Maroc: Le Maroc lève les réserves à la CEDEF
Cette décision, attendue depuis longtemps, a suscité l'approbation de la société civile ; le mouvement des femmes avait demandé à de multiples reprises aux autorités de prendre les mesures nécessaires pour faire appliquer cette convention au Maroc.
Malika Benradi, professeur et chercheur, a souligné que le Maroc avait ratifié cette convention en 1993 avec des réserves, refusant de mettre en application toute clause contraire à la législation nationale ou à la loi islamique. Ainsi, elle a rappelé que l'Article 9 traite du droit de la mère à transmettre sa nationalité à ses enfants, une forme de discrimination que le Maroc avait abandonnée en 2007.
L'Article 16 stipule pour sa part que les droits et les obligations au moment, pendant et après la dissolution du mariage sont basés sur le principe de l’égalité entre conjoints. Or, aux termes de la loi marocaine, il n'existe pas de véritable égalité entre eux en termes de soutien au ménage, qui relève uniquement des obligations de l'époux. Mme Benradi souligne que "la levée de ces réserves favorise le progrès, mais fait déjà l'objet de débats, en particulier en ce qui concerne des questions religieuses comme l'héritage."
Mme Nouzha Skalli, ministre du Développement Social, de la Famille et de la Solidarité, a fait part de sa satisfaction après le message du Roi. Pour elle, cette levée des réserves confirme la volonté du Maroc d'aller de l'avant en matière de droits des femmes. Elle a ajouté que "cette levée de réserves est accompagnée par d’autres projets qui confirment que le Maroc est sur la bonne voie de l’Etat de droit".
L'Organisation Marocaine des Droits de l'Homme s'est également félicitée de cette mesure. "Il faut mettre en place des mécanismes pour la mise en œuvre de cette convention internationale", a affirmé sa présidente Amina Bouayache, ajoutant que "le Maroc est devant une nouvelle conjoncture qui nécessite d’autres initiatives, principalement la réforme constitutionnelle et la législation en matière d’égalité des droits civils ainsi que d’autres mécanismes ayant trait à l’égalité entre les deux sexes."
Khadija Riyadi, la présidente de l'Association Marocaine des Droits de l'Homme, a pour sa part indiqué que "le Code de la famille doit être révisé, en particulier les articles ancrant la discrimination à l’égard des femmes, notamment en matière de mariage avec des étrangers, sur la question de la tutelle légale accordée toujours au père, de l’héritage et de la polygamie".
La présidente de l'Union de l'Action Féminine, Nezha Alaoui, a souligné qu'en levant ses réserves, le Maroc "a levé toutes les barrières qui entravent la consécration de l'égalité pleine et entière entre l'homme et la femme dans les domaines des droits économiques, sociaux et politiques."
La présidente de la Ligue Démocratique des Droits des Femmes, Fouzia Assouli, a affirmé qu’il s’agit d’une "révolution en douceur pour la consécration du principe de l'égalité entre l'homme et la femme, un principe pour lequel le mouvement féminin a lutté depuis des années."
Mais certains font déjà part de leur désaccord. Mustapha Ramid, chef du groupe parlementaire du Parti pour la Justice et le Développement, a déclaré que les questions qui relèvent de la loi islamique ne peuvent pas être remplacées. "On ne peut pas lever toutes les réserves au point que l’égalité soit totale, car cette question est régie par la charia."
17 decembre 2008
Par Sarah Touahri pour Magharebia à Rabat
Source: Magharebia
La lettre Royale au CCDH du 10 décembre 2008 à l’occasion du 60ème anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme annonce la levée des réserves émises à propos de la CEDAW lors de sa ratification par le Maroc en 1993.
A cette occasion, l’ADFM salue la déclaration Royale porteuse d’un message universaliste et politique à la hauteur de l’événement qui est commémoré. Elle souhaite également rappeler la pratique du Maroc dans sa relation avec la CEDAW à la veille du 30ème anniversaire de sa promulgation:
- Le Maroc a attendu 14 ans avant de ratifier la Convention en 1993 en marge de la conférence internationale de Vienne ;
- En plus du retard dans la ratification, l’ampleur et la nature des réserves émises sur les articles les plus importants de la CEDAW (articles 2-9-15-16) ont vidé cette ratification de son but et objet ;
- Le Maroc a ensuite attendu près de 8 ans avant de publier le texte de la Convention dans le Bulletin officiel (2001), condition essentielle à son entrée en vigueur et à sa recevabilité dans la norme juridique interne ;
- Puis a attendu encore 4 ans avant d’initier la réflexion autour de la levée des réserves (2005) à la veille des préparatifs pour sa candidature au Conseil des Droits de l’Homme de Genève ;
- Par la suite, le Maroc a déclaré son intention de lever certaines réserves partielles, de remplacer d’autres par des déclarations explicatives et également à adhérer au protocole additionnel de la CEDAW
- Enfin, durant l’année en cours, le Maroc a réaffirmé son intention de lever les réserves émises à propos de la CEDAW et d’adhérer à son protocole additionnel devant les instances internationales à deux occasions : lors de l’examen du rapport du Maroc sur la mise en œuvre de la Convention par le Comité CEDAW (janvier 2008) et lors du processus de l’Examen Périodique Universel (EPU, avril 2008)
Toutefois, à ce jour, le Secrétaire Général des Nations Unies n’a encore reçu aucun document officiel dans ce sens. Dans les jours à venir, le gouvernement va certainement se pencher sur l’examen des modalités concrètes pour la levée des réserves après un long cheminement que le mouvement des femmes a accompagné durant prés de deux décennies (conférences, interpellations, lettes ouvertes, sit-in, mise en place de la campagne « Egalité sans réserve », etc. ;)
Nous espérons que la lettre royale va inciter le gouvernement à mettre une fin heureuse à sa relation tumultueuse et ambiguë avec les réserves et saisir le SG des Nations Unies pour l’informer de la décision du Maroc de lever toutes les réserves sur la CEDAW - sans exception aucune - et d’adhérer à son protocole additionnel.
Association Démocratique des Femmes du Maroc
15- 12- 2008
www.adfm.ma
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