France: Elisabeth Badinter adresse celles qui portent la burqa
"Alors je m'interroge : pourquoi ne pas gagner les terres saoudiennes ou afghanes où nul ne vous de mandera de montrer votre visage, où vos filles seront voilées à leur tour, où votre époux pourra être polygame et vous répudier quand bon lui semble, ce qui fait tant souffrir nombre de femmes là- bas ? En vérité, vous utilisez les libertés démocratiques pour les retourner contre la démocratie. Sub version, provocation ou ignorance, le scandale est moins l'offense de votre rejet que la gifle que vous adressez à toutes vos soeurs opprimées qui, elles, risquent la mort pour jouir enfin des libertés que vous méprisez.
09 Juillet 2009
Par Elisabeth Badinter
Source : Le Nouvel Observateur
La présidente de Ni putes ni soumises Sihem Habchi et la philosophe Elisabeth Badinter ont toutes deux affirmé leur opposition au voile intégral en France, devant la commission parlementaire qui planche sur le sujet.
Reprise des travaux pour la commission parlementaire sur le voile intégral. Et, ce mercredi, des députés réunis sous la direction d’André Gerin (PCF) s’inquiètent. D'abord des résultats contradictoires sur le nombre de femmes portant le niqab ou la burqa en France: 367, selon une note de la sous-direction de l’information générale, contre 2.000 d’après un rapport confidentiel du ministère de l’Intérieur révélé ce mercredi par Le Figaro. S’il a demandé des précisions à Brice Hortefeux, André Gerin en fait «une affaire de principe, pas de chiffre».
Aussi préoccupés par la perception de la mission dans l’opinion, les députés comptent communiquer davantage pour «casser les jugements préétablis». Et contre-attaquer si nécessaire: ainsi ils ont vivement contesté les propos, dans le quotidien La Croix, de Yazid Sabeg, Commissaire à la diversité, qui voit dans ce débat le risque d’«un nouveau piège tendu à notre pays».
«Les institutions n'ont pas tendu la main»
Assise face aux membres de la mission, Sihem Habchi, présidente de Ni Putes Ni Soumises, première à être auditionnée de mercredi, dégaine d’entrée. Contre le voile intégral bien sûr,«symbole le plus violent de l’oppression de la femme», «point culminant d’une vision archaïque qui n’a rien à voir avec ma religion».
Mais, selon elle, «le mal ne vient pas que de ceux qui propagent»un message intégriste. Habchi cible également les politiques qui ont, déclare-t-elle, souvent esquivé la confrontation avec les islamistes pour tomber dans le «piège du relativisme culturel» :«Ceux censés défendre les libertés ne l’ont pas fait, ils se sont mis à hésiter quand on parle de voile.»
Mais Habchi va plus loin que le procès en «laxisme au nom des libertés»: «Pour mieux gérer les quartiers populaires, la société a trouvé une règle qui en arrangeait plus d’un, la loi du silence»,accuse-t-elle. Se faisant le porte-parole des musulmanes, la jeune femme d’origine algérienne accuse carrément: «Les institutions ne nous ont pas tendu la main, elle nous ont tendu le voile.»
Revendiquant le «droit» pour les musulmanes «à la protection de la République», elle appelle les députés à «ne pas avoir peur» et à faire preuve de fermeté: «On peut interdire au nom de la dignité de la personne.»
Emue, la jeune oratrice est applaudie à l’issue de son intervention. «Pas vraiment dans la tradition parlementaire»,freine Jean-Glavany (PS). La députée (PS) Sandrine Mazetier s’agace aussi de ce message. Elle reproche à la présidente de NPNS - qui a succédé à la secrétaire d’Etat Fadela Amara - de vouloir «démontrer que la gauche a échoué sur la politique de la ville et l’intégration. Il ne faut pas oublier que les combats laïcs et pour le droit des femmes ont été essentiellement menés par la gauche. Sihem Habchi était dans l’offensive politique».
«Il n’y a pas de vêtement du visage»
Elisabeth Badinter, elle, a évidemment placé son intervention sur le terrain philosophique. Avec précision, elle tente de démonter les arguments des quelques «revendicatrices» du voile intégral.«Liberté de se vêtir»? «Le visage n’est pas le corps et dans notre civilisation ocidentale, il n’existe pas de vêtement du visage». Et si une poignée de femmes disent assumer leur choix de porter le niqab ou la burqa, les autres, «les soumises, les baillonnées qui n’ont pas droit à la parole» doivent être protégées, fait-elle encore valoir.
Parlant d’une forme d’«automutilation civile», Elisabeth Badinter y voit aussi la négation de la valeur de fraternité, le voile intégral symbolisant la possibilité de voir le visage de l’autre sans être vue par lui et donc,«le refus d’entrer en contact avec l’autre, le refus de la réciprocité».
09 Septembre 2009
Source : Libération
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